Un soupçon de modernité, une subtile pointe de mystère, une exquise touche d’orientalisme, le tout dans un authentique écrin médiéval… En plein centre-ville de Figeac, le musée Champollion – Les Écritures du Monde est atypique, d’autant que son sujet interpelle en ce lieu qui respire le Moyen Âge. Or, contre toute attente, le musée et ses visites vous convie magistralement à traverser la Méditerranée, pour remonter le Nil, ressentir la magie des pharaons, et percer l’énigme des hiéroglyphes égyptiens. Tout ceci avant de mettre le cap vers des contrées plus lointaines, à la seule force de l’écriture et de la lecture d’une page ! Car oui, il faut vous y préparer, ici, il y a beaucoup à lire ! Mais rien que pour le plaisir, car, si traduction il y avait besoin, quelques savants hommes s’en sont chargés, à commencer par ce génial Champollion, dont la ville de Figeac est si fière…
Musée Champollion de Figeac
mille signes vous contemplent...Qui était Jean-François Champollion ?
Jean-François Champollion est né à Figeac en 1790 est le fils d’une famille de commerçants dont le père était originaire d’Isère et la mère de Figeac. C’est en 1801 que Champollion quitte Figeac, son fief lotois, pour rejoindre son frère, responsable de son éducation, à Grenoble. Il travaille dur malgré sa difficulté à respecter les règles. Sa passion pour les langues apparait dès le début de sa scolarité et c’est tout naturellement qu’il espère pouvoir aller plus loin dans son enseignement. Grâce aux sacrifices financiers de son frère, Champollion peut partir étudier les langues sur Paris. Il s’intéresse à toutes les langues anciennes et possède un emploi du temps très chargé. Après des années de travail passionné sur l’Égypte Ancienne, il réussit enfin à déchiffrer les hiéroglyphes grâce à la pierre de Rosette, ce qui changera le cours de sa vie et l’Histoire. De 1828 à 1829, il part en expédition scientifique en Égypte à la recherche de nouvelles informations et découvertes. Malheureusement, en 1832, il décède à l’âge de 41 ans probablement de l’épidémie de choléra qui s’abat sur Paris ou de la suite de ses maladies contractées durant son voyage en Égypte. La cause de sa mort n’est pas réellement connue. Il est aujourd’hui enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris.
« Je tiens mon affaire ! » … Nous sommes en 1822, et l’incroyable ténacité de Jean-François Champollion vient de payer ! Le jeune surdoué exulte, avant de s’effondrer, harassé de fatigue et d’émotion, sous le choc d’avoir enfin atteint son but : trouver la clé pour traduire les hiéroglyphes. Il vient de rentrer à jamais dans l’Histoire et de bouleverser le cours de sa vie ! Or, troublante coïncidence, juste avant sa naissance en 1790, à Figeac, un devin aurait prédit à ses heureux parents qu’il serait « la lumière des siècles à venir »…
De fait, il fallait bien un musée pour « déchiffrer » le destin de ce personnage singulier, qui a ouvert la voie à une nouvelle discipline scientifique, l’égyptologie. Et comme c’est à Figeac que ce petit génie a fait ses premières gammes, c’est naturellement sa maison natale, d’ailleurs labellisée « Maison des illustres », qui a été choisie pour lui rendre hommage…
La demeure est située place Champollion, à l’angle de la rue des Frères Champollion, face au café Champollion, et à deux pas de la fameuse place des Écritures, où l’artiste Joseph Kosuth a posé sa monumentale effigie de la célèbre pierre de Rosette, une véritable œuvre d’art, en souvenir de… Champollion ! Évidemment ! Vous l’aurez compris, Figeac a véritablement son enfant du pays dans le cœur, et pour lui, elle est allée jusqu’à créer un lieu unique qui, dès le premier regard, semble déjà vouloir brouiller les pistes pour qu’on ne puisse pas le « décoder » trop facilement…
C’est donc une solide bâtisse qui se dresse, et que l’on devine moyenâgeuse, comme la plupart de ses honorables voisines, tout en pierre de taille, et élégantes arcades. Et puis il y a cette mystérieuse double façade… Plus tard, en arpentant le musée, vous comprendrez qu’elle est composée d’un décor de cuivre et de verre, gravé d’une multitude de signes, 1000 au total, issus des différentes écritures connues dans le monde. L’effet visuel de cette « façade aux mille lettres » est étonnant, surtout à la nuit tombée, quand toute la maison s’habille d’une chaude couleur mordorée, faisant ressortir ses ouvertures, qui prennent alors de faux airs de moucharabiehs. Pas de doute, on vous invite au voyage dans cette visite… La visite peut être guidée ou non.
Dans les pas de Champollion
Dès l’entrée, le ton est donné, avec l’impression de pénétrer dans un tombeau égyptien. Sous les lumières tamisées, Champollion se dévoile à vous. Tout le rez-de-chaussée lui est consacré, savamment mis en scène pour suivre son imparable cheminement intellectuel, et comprendre comment il a pu réussir, là où tous les plus grands ont échoué. Objets et témoignages émouvants se succèdent : des croquis du savant, des lettres passionnées, rédigées à l’occasion de son unique voyage en Égypte, une copie de la précieuse pierre de Rosette, sans laquelle rien n’aurait été possible, et par-dessus tout, son carnet personnel, détaillant sa brillante démarche d’analyse.
Quant aux hiéroglyphes, ils sont partout !
Il ne fait aucun doute que Champollion avait une passion dévorante pour ces « sculptures sacrées », mais il n’a pas boudé les autres écritures, bien au contraire, puisque pour parvenir à ses fins, il s’est nourri d’elles tout au long de sa vie. Latin, grec, hébreu, arabe, démotique, chaldéen, syriaque, copte, etc. Toutes le passionnaient, et ce sont elles que le musée a aussi choisi de mettre à l’honneur…
Première écriture cunéiforme mésopotamienne, glyphes mayas, caractères chinois, phéniciens, étrusques… Les étages du musée vous emportent vers une kyrielle d’univers graphiques. Au fil de la visite, la passionnante histoire de l’écriture déroule ses 5 300 ans d’existence, au travers d’une exceptionnelle exposition de centaines d’objets d’hier et d’aujourd’hui.
Étonnamment, vous vous surprendrez à ne pas voir le temps passer, de même que les plus jeunes en âge de lire qui, en plus, n’auront aucun mal à appréhender le sujet, grâce aux animations et aux nombreux supports ludiques qui leur sont proposés. Rapidement, vous vous laisserez prendre à ce captivant jeu des écritures, et comprendrez que si les symboles et les façons de les retranscrire ont évolué, le besoin de laisser une trace est resté intact, quelle que soit la civilisation.
Pourtant, parfois, il a pu arriver que le code se perde dans l’histoire, menaçant d’entraîner dans l’oubli des mœurs, des rites, des savoirs uniques… Et c’est justement le destin que l’Égypte a bien failli connaître, si la rencontre entre Champollion et la pierre de Rosette ne s’était pas miraculeusement produite ! Probablement qu’aujourd’hui, Toutânkhamon et Néfertiti ne seraient pour nous que de parfaits inconnus… Heureusement, il n’en est rien, et d’une certaine manière, c’est un peu à la ville de Figeac qu’on le doit ! Et qui sait, peut-être suscitera-t-elle d’autres vocations à force de si bien mettre en lumière les prouesses de son cher Champollion ?
Alors sûrement est-il temps de vous faire une confidence : sachez que quelques écritures rares attendent toujours désespérément que l’on « craque » leur code, comme l’énigmatique Rongorongo de l’Île de Pâques. Si vous vous sentez l’âme d’un déchiffreur, il y a donc encore matière à marquer la postérité…